mardi, 19 of mars of 2024

Crise ECOronavirus : Au profit des banques ou des peuples ?

.

Les mesures d’exception prises pour enrayer le Coronavirus (arrêt des écoles et de la plupart des activités économiques) vont empêcher les comptes bancaires de se remplir à la fin du mois. Elles ne permettront pas à la plupart des individus-entreprises-collectivités de payer leurs dettes, en particulier leurs charges et remboursements d’emprunts. Jackpot pour les banques ? Comment éviter la faillite généralisée ?

.

Comme la Banque de France l’a exprimé elle-même il y a maintenant plus de 10 ans1, la création monétaire dans la plupart des pays aujourd’hui est principalement réalisée par « Argent Dette ».

.

  1. L’argent apparaît lorsqu’on réalise des emprunts, créé ex-nihilo par les banques commerciales (à 0%), il est détruit lorsqu’on rembourse les emprunts par les banques (sauf les intérêts qu’elle encaisse pour elle).
    .

  2. Au fur-et-à-mesure qu’on rembourse les emprunts, la masse monétaire diminue. Pour qu’elle se maintienne il faut inlassablement de nouveaux emprunteurs pour faire apparaître à nouveau de l’argent.
    .

  3. De surcroît, les emprunteurs doivent rembourser le capital emprunté + les intérêts, mais l’argent disponible sur la planète correspond seulement au capital, il n’y a pas encore d’argent pour payer les intérêts. Du coup, il faut encore plus de nouveaux emprunteurs chaque année pour faire apparaître l’argent nécessaire pour payer les intérêts des années précédentes.
    .
    Nous sommes, à l’échelon de la planète Terre, nécessairement dans une croissance exponentielle des emprunts, et donc dans une croissance exponentielle de la masse monétaire.
    .

  4. S’il n’y avait pas assez de nouveaux emprunteurs chaque année, l’argent manquerait et une partie des emprunteurs se retrouveraient en faillite, la perte de confiance restreindrait les possibilités d’emprunts, les faillites s’amplifieraient, cercle vicieux… comme en 2007.

.

Avec les mesures de cloisonnement nécessaires pour enrayer le coronavirus, les nouveaux emprunteurs vont se faire rares et les gens, entreprises et collectivités vont avoir du mal à payer leurs emprunts à la fin des prochains mois. Les reports de charge ne feront que repousser de quelques mois les faillites. Une crise financière pire qu’en 2007 se profile pour les prochaines semaines. Quels scénarios possibles ?

A. Pas d’interventions étatiques, crise financière tout de suite

Nombre d’individus, d’entreprises et de collectivités font faillite dans les prochaines semaines. Les emprunteurs diminuent encore plus, la masse monétaire diminue de plus belle et les faillites s’amplifient. Au profit des banques qui récupèrent toutes les garanties et hypothèques contractées par les emprunteurs.

B. Endettements supplémentaires des États, faillite et rigueur totale dans quelques mois

Les États contractent eux-même de nouveaux emprunts exceptionnels auprès des banques, comme en 2007, avec la conséquence de se retrouver encore plus sur-endettés, comme les pays du Sud dans les années 80 qui se sont retrouvés coincés dans des Ajustements structurels aujourd’hui appelés « Rigueur ». Ils seront alors entièrement sous contrôle des banques dans quelques mois. Rigueur, démantèlement des derniers services publics, privatisations des derniers biens communs (de la santé !)…

C. Création monétaire par les États, pour financer la santé et maintenir les comptes bancaires

Les États décident de supprimer les règles qui leur interdisent de créer eux-même de la monnaie (lois et décrets mis en place à partir de 1971 instaurant l’Argent-Dette et l’interdiction de la création monétaire par les Banques Centrales). Ils créent alors autant d’argent ex-nihilo (à partir de rien, à 0%) qu’il le faut, paient les systèmes de santé et versent aux habitant.e.s – entreprises- collectivités de quoi payer leurs dépenses et rembourser leurs emprunts. La crise financière est évitée. Commence même à diminuer l’obligation de croissance exponentielle de la masse monétaire mondiale.

Avec comme conséquences qu’au final ce sont les banques qui récupèrent la manne, et que les chefs d’États se retrouvent avec un pouvoir énorme – dans les Argentcraties actuelles, on ne serait pas à l’abri de quelques retours de stalinisme ou d’autres dictatures –.

D. Création monétaire distributive, pour remettre l’économie au service des femmes et des hommes

Les États mettent en place des monnaies distributives, basées sur les richesses réelles : la monnaie correspond aux biens et services existants, elle est partagée équitablement à tous les habitants. En Économie Distributive2, avec le revenu d’existence, la suppression du lien travail-revenu, la suppression de l’obligation de rentabilité financière et la propriété d’usage, tout le monde est assuré de conserver son revenu, même en diminuant son temps de travail ou en se mettant en quarantaine. Les employeurs n’ont pas de salaires à verser et donc peuvent ralentir-stopper-augmenter leurs activités en grande tranquillité. Il n’y a plus d’emprunt à rembourser, d’impôt à payer, ni de loyer à payer. Sachant qu’il est reconnu depuis 15 ans que nous sommes capables de nourrir plus de 10 milliards d’habitants sur la planète (si notre production agricole s’organise différemment), 100 % des gens sont assurés de manger – se nourrir – se cultiver – se divertir, 95 % des gens vivent mieux que dans le système d’Argent-Dette.

En la découvrant, chacun se rendra compte qu’elle est techniquement facile à mettre en œuvre dans les pays « riches ». Les seuls obstacles sont la non connaissance et l’idée reçue que « Rien ne peut changer car les autres ne veulent pas changer ». Avec un effort intellectuel des citoyens ET des politiques…,

.

Seul le dernier scénario serait vraiment bénéfique et durable pour les populations. Mais, tellement inconnue à ce jour, l’Économie Distributive est impossible à mettre en œuvre aujourd’hui. Les 2 premiers scenarios seraient au profit des banques, pas des employé.e.s des banques mais des administrateurs des grandes banques, les quelques personnes loin des caméras qui se partagent les conseils d’administrations de toutes les multinationales, les « banksters », dont l’objectif est le totalitarisme de monopoles privés. Avec des conséquences catastrophiques pour les populations. Le 3è limiterait l’hégémonie des banques, permettrait aux populations de sauver leur peau et même… de préparer la mise en place du 4è.

Ne tombons pas dans le piège de la spoliation par les banques, il est urgent de réclamer et mettre en œuvre dès aujourd’hui une création monétaire étatique. Qui nous permettra d’assurer la santé et la nourriture, puis de réfléchir à une économie équitable, réellement durable, distributive. Donc redonnons maintenant le pouvoir de création monétaire aux États pour permettre à nos pays de vivre autrement que dans la dictature financière des banques.

.

Eric Goujot

.

1 Livret « La monnaie & nous » de la Banque de France de 2009, extrait des pages 10-11 :
« Prenons le cas d’une entreprise : pour fonctionner, elle a souvent besoin d’argent frais. Car il lui faut du temps pour fabriquer ses produits, les vendre et être payée. Et en attendant, elle doit payer ses fournisseurs, acheter du matériel et rémunérer ses salariés.
Elle s’adresse donc à sa banque, qui va pouvoir lui accorder un crédit, moyennant intérêt bien entendu. La banque inscrit le montant du crédit au compte de l’entreprise : la banque a créé de la monnaie.
C’est ainsi que la banque augmente par le crédit le montant des dépôts et crée de la monnaie. De son côté, l’entrepreneur s’engage à rembourser le crédit et les intérêts correspondants, grâce aux profits qu’il compte retirer de son activité.
L’entrepreneur a maintenant les moyens de produire, puis de vendre sa production. Il peut alors rembourser son
banquier, et ses recettes lui permettent de payer les intérêts de son emprunt, qui sont la rémunération de la banque.
Quand elle a reçu le remboursement, la banque annule le crédit accordé et la quantité de monnaie diminue. »

2 Économie Distributive : modèle économique réfléchi en plein milieu de la Crise de 29, appelé ainsi par Jacques Duboin, ancien secrétaire d’État et fondateur de la Grande Relève (www.economiedistributive.fr)
Cf. http://ecodistributive.chez-alice.fr ou www.lecolibri.org

.

.

Article pdf

.

publié le 16/03/2020
Ind 01b le 18/03/2020 (ajout de l’extrait du livret de la Banque de France)
Ind 02a le 21/03/2020


Leave a comment


Comments RSS TrackBack 2 comments